Salut Christian,


Je voulais t’envoyer toute une liste de clips et de vidéastes en ligne, mais comme ca traîne, que mine de rien y'en a beaucoup, et que je fais d’autres trucs en priorité (expo à Linazay et profiter des vacances), je t’envoie à la place une suite de vidéos que j’avais faîtes, constituant une sorte de trilogie (en 5 volumes en fait). La vraie trilogie, appelée « trilogie des errances » étant constitué de DECOHERRANCE, Neurasthène et Sans titre (Noël), les deux autres, Fragments et Le temps est compté, ont été fait lors de session rapide et font office d’interlude. Je les met dans l’ordre de leur création.


Ces vidéos constituent une sorte de genre qui s’est construit au fur et à mesure, proche du film essai, ou du documentaire. L’écriture du cadrage se fait au moment de la captation, l’écriture du montage au moment du montage, il s’agit de glaner des images, du texte du son, des musiques, pendant un laps de temps, puis d’en faire quelques chose, de tenter de les rapprocher pour trouver un récit qui les relierais, faire un discours avec des images, théorique, comme dans le film essai, ou plus autobiographique. Ce sont donc des films très personnels, dans lequel je me suis pas mal investis, peut être un peu l’équivalent filmé des journaux intime/de recherche que j’ai tenu jusque là, il y a donc aussi là dedans une forte part affective quand à ce qui est filmé et dans la forme même (notamment lorsqu’il s’agit de paysage d’enfance, comme la forêt ou les HLM qui reviennent souvent), peut être relevant d'un symbolisme personnel qui n'est pas partagé. En effet en l’écrivant je crois qu’il s’agit là des productions artistiques les plus « vraies » ou « authentiques » (j’aime pas trop ce mot, disons « profondes ») que j’aie faite jusqu’à maintenant, c’est en tout cas des films que j’ai fait d’abord pour moi, parce que je ressentais le besoin de les faire.



Dans l’association d’audiovisuel que je côtoie depuis un moment, Sysiphe Vidéo, on m’avais dit que pour avoir des subvention du CNC, pour un documentaire, il fallait donner une écriture du film en amont, en exagérant, si tu fais un documentaire sur la pêche, il faut que tu sache ce que le pêcheur va dire à la caméra, et prévoir à quel moment il va pêcher un poisson. Evidement j'ai trouvé ca couillon.C’est à partir de là que je me suis questionné sur le lien entre la méthode qui consite à écrire en amont un film avec un story board par exemple, et la volonté de réaliser un film documentaire, tentant de s'approcher d'un réel. Si l’on sait à l’avance ce qu’il y aura dans le film documentaire, ca veut dire qu’on est jamais surpris par le réel, ca veut dire qu’on impose au moment de la captation une certaine forme à ce qui apparaît dans la caméra, on impose à l’avance ce qui va arriver dans le cadre, quelques part, c’est de la fiction. C’est là que je me suis dit qu’en fait, ce qui fait qu’un film est vraiment documentaire, c’est à partir du moment où on ne sait pas à l’avance ce que l’on filme, c’est quand on peut pas prévoir ce qui va arriver dans le cadre, parce qu’on ne contrôle pas ca, car « le réel, c’est ce qu’on ne contrôle pas » (#Lacan je crois, j’avais lu cette phrase que j’aime beaucoup dans l’insurrection qui vient, mais je la retrouve pas…). Dès lors, le documentaire commence dans ce qui échappe à la préécriture du film, dans ce que l’on ne voit pas encore, le passage de ce qui n’est pas encore vu dans ce qui va l’être se joue dans l’im-prévu, dans ce qui surgit, dans ce qui émerge. Accepter l’imprévu donc, c’est être dans une sorte d’improvisation permanente, ou disons une forme « d’imprévisuation », une attitude consistant à ne pas rejetter ce qui tente de s’immiscer dans le cadre sans qu’on l’aie invité. Une démarche qui s’oppose donc à la volonté hygiéniste de vouloir tout « mettre en scène » comme dans la plupart des fiction. Il s’agit ici de trouver le procédé inverse, d'accéder à ce que l'on tente de cacher lorsqu'on met en scène.


Bon après ca c’était un peu dans le principe, je crois que ca a été le point de départ pour le premier film, ca se mêle aussi avec une grande part d’intuition, qui fournit aussi le moteur, si j’ai envie de filmer la forêt, je prends ma caméra, je vais en forêt et je filme en fonction. Mais c’est comme si l’écriture filmique était faite par l’inconscient, donc par ce que ne contrôle pas la conscience. Ca me fait penser à l’écriture automatique des surréealiste en un sens. Et aussi à ce que décrit Artaud quand à la conscience. C’est peut être pas pour rien que le dernier film me fait maintenant penser à du shamanisme.




__TRILOGIE DES ERRANCES__






DECOHERRANCE

– 29 mins - 1er de la trilogie

https://www.youtube.com/watch?v=sI3ZScxO4yg


Réalisé en 2013, avant mon entrée à l’EESI donc. Je passe deux semaines de vacances à Tours, chez mon père (dans un quartier HLM), et passe pas mal de temps avec Nathan, un ami d’enfance que j’avais déjà filmé dans « la fuite en avant ». J’utilise comme caméra mon téléphone portable, toujours avec moi, ce qui fait que ce n’est pas moi qui créé une situation en vue de la filmer, mais plutôt que c’est au moment où je suis dans une situation intéressante que je la capte. La caméra ne provoque pas la situation, elle ne fais que la documenter, la plupart des plans sont donc glanés, et pas écrits à l’avance.


Les musiques sont faites dans mon home studio, j’avais anticipé qu’elles seraient utilisées pour ce film donc j’en avais fait un peu à la chaîne, mais ca corresponds à l’état émotionnel de cette période. Le montage arrive après coup, comme une sorte de collage entre les images les sons et les discours, en tentant de trouver une cohérence (…ou une décho-errance). Ca parle de consumérisme dans les supermarchés et de voitures.





Neurasthène

– 29 mins – 2eme de la trilogie

https://www.youtube.com/watch?v=vIAntnwkelM


Durant mon BTS j’ai fait un stage à Télé Bocal à Paris, télévision associative, mais ca c’est pas très bien passé, le travail et la ville était vraiment déprimants, angoissants et interminable, à l’image du film. Le film se construit là aussi sur les mêmes modes de productions.





Fragments

– 11 mins - Interlude

https://www.youtube.com/watch?v=38meE4LdtDM

Réalisé lors d’une session avec Laurent Makowec. Traite de l’émancipation sur un plan sexuel/politique.




Le temps est compté

– 6 mins – Interlude bis

https://www.youtube.com/watch?v=O9lP0SZscjA

Réalisé dans le cadre d’une session de film en 48h. A propos du temps et de l’école. Celui là est le plus romancé.




Sans titre (Noël)

- 22 mins – 3eme de la trilogie

https://www.youtube.com/watch?v=QAwwrlzUeXA

Réalisé en DNA2 à Poitier. C’est le dernier gros film que j’ai fait à l’EESI, peut être le plus abouti formellement. Quand je l’ai présenté en classe, on m’a dit que c’était pas très construit, que ca partait dans tous les sens, et qu’on comprenait pas où je voulais aller, qu’il fallait le structurer mieux (ce qui allait à l’encontre de la démarche documentaire en écriture automatique décrite au dessus). C’est pas la première fois qu’on me dis ca mais comme c’était quand même très personnel comme film ca m’as énervé et je l’ai pas remontré (et de toute façon à Poitier j’avais tendance à montrer mes productions juste une fois). C’est en effet assez frustrant puisque quand je justifie tout de manière très rationnelle pour me faire comprendre on me dit que je doit arrêter d’être intello et me lâcher et quand je me lâche, on me dis qu’on comprends pas où je veux aller, que c’est confus et qu’il faut mieux structurer mes productions. Ce tandem entre contrôle et lâcher prise, intellect et sensible, linéarité et complexité. Il a quand même été diffusé au festival Bandis Mages, mine de rien, festival à Bourges géré par David Legrand (intervenant à l’école, workshop médialab j’y serai la semaine pro). Ce dernier film là est beaucoup plus « sensitif » que les autres, les images sont filmés au reflex et les sons font partie des recherches sonore organiques que je faisait à ce moment là, les textes sont improvisés à l’oral également, il est préférable de le voir avec un grand écran et un bon son avec des basses. Tu ressentira certainement ce même sentiment d’urgence qui m’anime en hiver. De manière général ces films sont fait dans des périodes tristes et introspectives.









Et en bonus voici une autre vidéo d’avant l’EESI, dans la continuité du contre-festival de la bande dessiné. Je voulais faire un petit reportage pour la web tv « Rezonnance TV » à Angoulême, qui couvrait l’événement, mais pas à la manière du journalisme consensuel, donc du coup, je me lâche.


De l’opportunisme culturel

– 5 mins

https://www.youtube.com/watch?v=BQq7MKclnvQ





A bientôt sur Linazay !
Mail envoyé à Christian Le dimanche 11 mars 2018