Mail envoyé à Christian Le 20 mai 2018
Salut Christian



J’ai fait un trèèèès long mail (et encore je ne t’en envoie que la moitié au final…) en reprenant quelques éléments de la discussion de l’autre fois, puisque j’ai pris pas mal de note.



Concernant le fait que la forme contemporaine de société est aujourd’hui la tribu, c’est en effet ce qui est aujourd’hui défendu par le Comité Invisible, prenant comme figure le gang (ou aux « Gong », sorte de mafia anarchiste chinoise prise en modèle par Hackim Bey, dans la même veine post-situ). J’avais discuté avec un sympathisant sur Poitier et il disait bien que la société était un leur, qu’il n’avait aucun compte à rendre à ce qui est vu comme une forme abstraite, et que la seule communauté qui comptait pour lui était sa communauté immédiate. Le communalisme, comme se revendiquait ce groupe, similaire à d’autre à la ZAD, est donc bien dans cette lignée de vouloir créer des groupe de base, des « comités de lutte », qui soient aussi des comités de vie. Cela fait partie d’une réflexion autours de ce qui fait communauté qui vient d’un long débat entre Bataille, Nancy et Agamben, mais Caroline Williams qui s’intéresse beaucoup au sujet et avec qui j’échange beaucoup en sait bien plus que moi sur la question.


Concernant le terme de « tribu », c’est celui qui est utilisé par Michel Maffessolini. Sa conception, toute personnelle, du post-modernisme, repose sur le fait que face au modernisme rationnel cartesien se construit aujourd’hui une forme de nouvel archaïsme, avec un autre rapport au temps (un temps non anticipée, une immédiateté en fait), avec un phénomène de constitution de tribu également, et que c’est des formes qui sont en germe en particulier dans l’art contemporain (c’est en tout cas ce que j’ai compris). De mon point de vue, ce qu’il décrit semblent plutôt se retrouver dans une contre histoire de la modernité, à travers les avants gardes historiques (des cercles nihilistes, dada, lettriste, surréaliste, situ et post-situ punk…) qui ont amené en effet un certain « primitivisme moderne », c’est aussi de ca dont d’ailleurs Hackim Bey se revendique (pour un nouveau Paléolitisme).


Un article sur le sujet

https://www.kaosphorus.net/1502/trouver-son-shangri-la/


Pour Mafessoli, qui se fait gentiment bâcher dans l’article, parce que c’est quand même une figure de la sociologie intrigante.

https://www.slate.fr/story/85967/michel-maffesoli-sociologie-troll




Dans un autre registre, il y a la série télé Friends, qui mine de rien a popularisé l’importance des liens amicaux à travers la colocation. L’expérience du vivre ensemble à travers la coloc (et en poussant plus loin allant vers des formes de polyamour et de communautés amoureuses) est aujourd’hui très présente, pour ma part j’ai déjà vécu dans 3 colocs différentes, c’est une pratique qui me semble beaucoup plus courante que pour mes parents qui par exemple n’ont pas vécu ca. Certainement qu’aujourd’hui, vivre à plusieurs n’est pas spécialement lié à une question purement économique mais relève aussi d’un choix de vie. Ce communautarisme me semble quelques part assez sain, il s’extrait de l’individualisme solitaire tout en étant multiple et choisi. Je n’aime pas trop la critique de « l’individualisme », je pense au contraire que l’on manque d’individualité, on est trop tous pareil, mais ce manque d’individualité, de subjectivité, est construite culturellement, elle est lié aussi à un type particulier de groupe et d’isolement, nous sommes isolés dans une foule anonyme. Nous ne pouvons exprimer et ressentir notre différence que faces aux autre, dans la profondeur des liens qui nous unissent aux autres ou qui nous en éloigne. Cette opposition entre individu et collectif ne tiens pas, ce n’est que dans le lien que je me construit, que je me différencie. Encore faut il avoir la possibilité de créer des liens, d’avoir accès à des espaces où c’est possible, où l’on peut faire confiance sans danger. La critique de ce type particulier de subjectivité est critiquée par le comité invisible, notamment à travers le concept de « bloom », une sorte d’homme vidé de a substance et qui ne ferait que porter des masque (chaitre 1 de l’insurrection qui vient, aussi développé dans le bouquin « théorie du bloom », qui est une bouilli littéraire philosophique, c’est très beau mais j’ai rien compris). C’est quelques chose qui semble proche du concept de l’égo, à savoir dépendre de l’image que l’on a de soi (et que les autres plaquent sur nous), plutôt qu’être dans un pur désir qui ne se regarde pas (égo qui en psychanalyse correspondrai à ce fameux surmoi). Je me souvient aussi d’une brochure « en finir avec la mort », qui m’avait bien plus, mais impossible de la retrouver. Elle était citée par une autre brochure qui m’avait beaucoup plus aussi, s’inspirant des écrits de Deleuzes et Guattari (et dans la même veine que le comité invisible), Rupture, qui m’as beaucoup inspiré.


Rupture

https://infokiosques.net/lire.php?id_article=415


Livre – L’insurrection qui vient

http://bloom0101.org/?parution=linsurrection-qui-vient



Il y a aussi Christopher Lasch qui a écrit « la culture du narcissisme », c’est un bouquin que je n’ai pas lu (je me renseigne dessus en ce moment) mais qui s’annonce très bien quoique ancré dans un modèle très psy un peu réac, avec notamment l’idée que l’absence de limite et l’encouragement à la consommation dans tous les domaine entraîne un certain type de psyché et d’individu qui est aliéné par ses désir qu’il ne contrôle plus, une sorte de fuite en avant où l’on est toujours insatisfait. Il y a cette idée que le libéralisme actuel produit alors une psyché particulière, une psyché capitaliste. Face à ce monde désincarné où l’égo est sur sollicité, le seul réconfort est apporté par… la tribu justement. C’est en tout cas ce que j’ai lu dans le résumé à travers cette brochure des « renseignements généreux », qui par ailleurs ont rajouté une note à la fin, comparant les mouvements de gauche radical (type mouvement étudiants loi Vidal) à ce comportement capitaliste, ce qui est très bien trouvé et m’a fait prendre un peu de distance sur ce mode de lutte. Par ailleurs, un bouquin aux édition l’échappé a repris ces thèses pour l’appliquer à l’art contemporain (mais je l’ai pas lu, quoique dans les critiques que j’ai pu voir je suis assez méfiant). Concernant ce mouvement intellectuel, en France incarné par Jean Claude Michéa apparemment, il inspire une frange de la décroissance, sur cette question de la nécessité de la limite, mais c’est une critique qui sous des couvert de radicalité frotte avec un certain conservatisme (défense de la limite, donc du « Père »). Ainsi, le journal « la décroissance », semble pas mal défendre ces thèses mais c’est alors une « décroissance ni de gauche ni de droite, donc de droite », comme le dis Paul Ariès. En effet, ils vont aussi défendre le fait que le genre n’est pas une construction sociale, et qu’il faut respecter la limite du corps, en le prétendant naturel, et justifier ainsi à travers la nécessité de la limite un ensemble de restriction du désir.



La brochure sur la culture du narcissime (avec la note sur les mouvement militants)

http://www.les-renseignements-genereux.org/brochures/443



Le narcissisme de l’art contemporain

http://www.lechappee.org/index.php/collections/pour-en-finir-avec/du-narcissisme-de-art-contemporain





Pour ma part, cette question de la limite, de la restriction, je la trouve importante, et elle irrigue en partie mon travail. Ainsi dans la puissance de ne pas, à travers les volonté de réduction (réduire les addictions, les consommations, les dépendances, l’égo), je tente une émancipation à travers une forme de contrôle de mes désirs, et c’est donc en lien avec ca. La question du narcissisme me touche également, déjà parce que je ne sais jamais si l’image que j’ai de moi et de mes capacités est juste ou surévaluée (ou sous évaluée), mais aussi parce que cela touche au jugement, à l’amour propre et à une certaine dépendance au regard de l’autre. Ce n’est pas pour rien si jusque là mon nom de scène (musiciens) est « Narcisse » (maintenant changé en « post-narcisse »). En plus de la référence à l’homosexualité, cette symbolique de l’image de soi et du miroir me touche.



Pour ma part, je souscrit dans un sens à cette question de la limite, tout en souhaitant garder le caractère émancipatoire de la libération du désir. S’il y a nécessité de mettre des limites, c’est dans le but de maintenir le contrôle de ses désirs, de s’assurer que c’est bien le sien et pas celui du marché par exemple. Ainsi, il y aurait d’un côté la possibilité de développer son propre désir, et de l’autre de s’en protéger lorsqu’il devient aliéné (qu’il vient de l’extérieur ou qu’on ne peut plus le contrôler). Si l’on veut que poser des limites soit un acte émancipateur, alors il faut que ce soit l’individu qui fixe lui même ses propres limites, qu’il ait les moyens de le faire (les moyens de se protéger de la publicité, de l’égo, de la nécessité de réussir, tout ca). Si ce n’est pas lui qui fixe les limites mais l’Etat par exemple, alors là c’est moins émancipateur, c’est une certaine protection mais qui corresponds à l’ancien modèle traditionnel. Ainsi, dans mon modèle (et c’est aussi un peu ce que dis Castoriadis sur la nécessité de se fixer ses propres limites), dans mon modèle donc, face au libéralisme libertaire (terme mal choisi mais on fait avec) où on peut imposer son cadre à l’autre qui s’apparente au modèle sadique où « tout est permi » (Annah Arendt, définissant ainsi un système fasciste), face à un modèle traditionnel où le cadre est très restrictif, je propose le modèle « autonomie », où chacun fixe son propre cadre, et donc aussi ses propres limites, c’est le modèle du « cadre masochiste » (masochisme et sadique étant ici à entendre dans le sens de Deleuze). Ainsi, il ne suffit pas que chacun puisse libérer ses désir, il faut aussi que chacun ait les moyen de se fixer des limites (quitte à les repousser après). Il y a une différence entre le « ni dieux ni maître », et le « soyez votre propre maître ».




Bon je dérive un peu et je passe beaucoup de temps sur ce point mais c’est parce que c’est un sujet qui me touche comme tu vois. Mais c’est bien parce que c’est l’occasion de faire un petit résumé de mes références thématiques.



Du coup je vais continuer sur la question de la psychanalyse et de la psychiâtrie, qui peut être était réactionnaire en 68, mais qui a beaucoup évolué depuis, notamment à travers l’antipsychiatrie qui remet en cause la prééminence de la raison et la une remise en cause féministe et libertaire qui ont remis en jeu la fonction du Père et du point de vue hétérocentré (ce fameux complexe d’Oedipe). J’avais lu (en fait pas tous mais j’en ai beaucoup discuté avec mon pote Nathan que tu a vu dans mes films) « La fabrique des imposteur » de Roland Gori. C’est un psychanalyste donc, très inspiré par Foucault, qui a écrit aussi « l’individu ingouvernable », qui a donné le slogan « soyons ingouvernable » repris dans les manifs, j’imagine donc qu’il a eut un impact dans les milieux militant (ou alors c’est une coïncidence - après recherche il s’agit en fait d’un mot d’ordre de Foucault…). Dans cet essai, il dis en gros que dans un système où tous est évalué en permanence, à travers des dispositifs de rationalité pratico-formelle (technique et juridique), il se construit tout un tas de norme sociale, et que si l’on veut survivre, il faut y adhérer. Cela fait en sorte que si l’on veut être bien vu en société, il faut incorporer ces normes, il faut mentir sur ce que l’on est, et donc devenir un imposteur, pour se protéger. Depuis quelques années, l’omniprésence des évaluation sur un mode protocolaire entraîne une accélération de ce processus. La société devient une fabrique des imposteurs, qui est le profil psychologique que produit le capitalisme actuellement. Je l’avais déjà cité dans mes écrits précédents et donc je le relie aux société de contrôle de Deleuze, mais aussi au dispositif du bilan et du diplôme, qui fonctionne sur les même ressorts, et qui je m’en rends compte maintenant, agit de manière similaire sur cette question d’imposture (mais ca me permet de comprendre que du coup ce n’est pas comme une exposition, et que mon travail peut se porter sur cette situation précisément…). Concernant l’évaluation, Roland Gori a fait une conférence qui résume très bien tous ça, toute la critique que je peux faire à l’évaluation lors des bilan et ECTS tiens là dedans.


Roland Gori – De quoi l’évaluation est elle le nom ?

https://www.youtube.com/watch?v=QkXwCr_2mbY



Pour continuer sur le sujet de la psychanalyse et l’antipsychiatrie, j’avais découvert pendant la mobilité Philippe Garnier, qui parle très bien de psychanalyse, en faisant le lien avec l’anarchie, et en en parlant comme d’une manière de dépasser le langage, de révéler le réel dans l’au de là des mots. Cela rejoint ces mouvements philosophiques (post moderne là encore ? Décidément…) qui considère que le sujet est produit, notamment par le langage, et que travailler les mots, c’est aussi construire du sujet (et bon je vais pas développer ca mais y’a un petit milieu autours de la littérature expérimentale et poésie sonore qui semble se rattacher à ça mais je connais très mal, enfin ca me plaît dans l’idée que le sujet est construis par la forme, par le langage, même si c’est peut être pas suffisant). J’aime bien cette idée que la psyché, le moi tout ca, est aliéné, et que travailler sur soi, sur son être intime, sur ses perceptions et images de soi, sur ses désir, c’est déjà un acte politique, et certainement le plus profond. Comme si le capitalisme nous empêchait d’être nous même, nous séparait d’une véritable communion avec son être profond. Vers un psychisme révolutionnaire ?



Philippe Garnier

http://1libertaire.free.fr/Garnier16.html (celui là sur l’antipsychiatrie est très bien)

http://1libertaire.free.fr/Garnier21.html (là j’ai plus de mal ca coupe beaucoup de notion que j’ai pas, mais ca se rapproche de Tinocco en traduisant)



Enfin, je finit sur ce bouquin que j’ai quasiment fini, et qui aura été LE bouquin du semestre (et peut être de l’EESI, l’avenir me le dira), « les « surdoué » et les autres ». Comme je t’avais dis je m’identifie plus ou moins facilement à cette figure du surdoué, qui devient à la mode en ce moment. Historiquement relié à la figure populaire et méritocrate du petit génie qui a son doctorat à 15 ans, le terme de surdoué a été reconsidéré sous une figure psychologique plus complexe dans les années 2000, à travers des bouquins de vulgarisation (notamment Jeanne Siaud Facchin avec « trop intelligent pour être heureux », qui par ailleurs est addictologue à la base ce qui est notable, ou Cécile Bost « différence et souffrance de l’adulte surdoué », c’est en tout cas ceux que j’ai lu, il y a aussi plein de forum sur le sujet qui reprennent ces questions, très fourni, où les utilisateurs font un travail de recherche souvent assez poussé. Il y a aussi des chaîne youtube, en particulier « une psy à la maison » qui a fait tout de même 250 vidéos sur le sujet). Il ne s’agit plus ici d’une intelligence qui serait démultipliée à l’extrême (qui serait plutôt du domaine de l’autisme savant par exemple), mais plutôt d’un mode de pensée et d’un mode de sentir qui provoquerait une pensée « différente », plus intuitive, plus sensible, avec un rapport au temps, à la linéarité, au langage, à l’autorité, à l’humeur, à plein de truc, différent. Etre surdoué c’est donc avoir plus de 130 de QI (avec tous les biais et interrogations épistémologiques que représente ce test), mais c’est presque que comme une conséquence indirecte, puisque ce qui apparaît dans ce profil qui se construit dans ces livres, c’est surtout une sorte d’hypersensibilité, et un certain décalage par rapport aux autre et à la norme, une sorte de singularité, une intensité du rapport au chose, mais aussi une certaine fragilité et une souffrance qui va avec, une surmentalisation, une imaturité affective. Cette littérature sur le sujet, qui part de la psychologie, voit ca comme une capacité innée, comme un profil type (style autisme), qui fait que comme certain sont plus sensible, que leur cerveau est construit comme ca, alors ils sont « hors norme » (tout en précisant qu’il ne s’agit pas d’une pathologie). Ce ne serait alors qu’un profil psychologique particulier, une sorte de mutant avec des superpouvoir qui peuvent être handicapant, et ce serait aux surdoués de trouver comment s’adapter à ce monde qui n’est pas assez rapide pour eux, le problème est ici personnel. Le terme de surdoué étant problématique à plus d’un titre (parce qu’il ne s’agit pas de hiérarchie, d’être « plus » intelligent, c’est plutôt un autre type d’intelligence qui est évoqué, d’ailleurs dans cette nouvelle qualification, un tiers des surdoués réussissent à l’école, un tiers ca passe, et un tiers sont des cancres, donc ca ne tient plus vraiment comme terme sur un plan scolaire). Il a donc été proposé les terme de HQI, enfant précoce, hypersensible (mais c’est un peu différent), et surtout pour bien se démarquer de tous ces synonymes, le terme de « zèbre ». Cela pose pas mal de question autours du fait de nommer, de construire des cases, tout comme on en met pour les autiste ou schizophrène, mais en même temps, dans un cadre de recherche qui pase par du texte, on est obligé de nommer. Et donc je vais continuer à utiliser le terme de « surdoué » parce qu’il est utilisé ensuite avec Carlos Tinocco, avec des guillemets parce que ca ne tiens pas étymologiquement.


Une psy à la maison – 250 vidéo sur le sujet du surdoué version clinique

https://www.youtube.com/channel/UCb7wV4tDZ5Krr-eqPV42plg/videos




Jusque là j’avais été séduit par ces théories, parce que je me reconnaissais dedans, tu sais comme quand tu lis un bouquin et d’un seul coup tu t’identifie au héros ou à un discours parce que ca parle de quelques chose que tu vis mais que t’a jamais vraiment réussi à mettre des mots dessus et que du coup tu peux prendre confiance en tes ressentis parce que tu vois que t’es pas le seul à sentir les choses comme ca. Donc y’avait ca et en même temps je trouve que c’est un peu facile de s’autodiagnostiquer surdoué, parce que rien que dans le terme et même dans le principe, c’est une catégorie qui permet d’éluder un peu facilement un mal être, une manière de panser son égo en se disant que c’est parce qu’on est pas comme tout le monde, y’a un côté « les autres c’est tous des moutons » que je trouve un peu facile si on n’a pas de preuve tangible. De plus, le profil est assez flou, il peut dire un truc et son inverse, et beaucoup de gens se reconnaissent dedans, certainement pour ces raisons là par ailleurs. C’est comme se dire hypersensible, il est compliqué de savoir si on est plus sensible que les autres vu qu’on ne connaît pas leur ressentis, ca peut être vu comme une manière de justifier une souffrance qui sans ces terme serait plus compliqué à justifier (quoique l’hypersensibilité soit aussi un diagnostic qui est posé en psychologie). Un petit peu comme quand tu te renseigne sur une maladie et du coup t’es convaincu de l’avoir. Donc je suis embêté parce que d’un côté ce sujet m’intéresse et je sens que ca peut m’aider à me comprendre mieux, de l’autre je me dis qu’il y a quelques chose de séduisant qui joue sur l’égo et une sorte d’indécence et de facilité à s’auto-diagnostiquer (en plus du fait que le terme est très mal reçu). C’est pour cela que j’ai trouvé la solution de m’autoriser à m’intéresser au sujet, parce que c’est un sujet comme un autre, mais que je ne donne pas le droit de m’identifier directement sans avoir une preuve concrète et extérieure (« scientifique ») qui ne soit pas simplement lié à des ressentis internes, sans avoir quelque chose de solide d’un point de vue épistémologique, quelques chose qui tienne la route quoi. Et d’éviter d’en parler ouvertement aussi. Les seuls éléments qui pourrait sanctionner disont « objectivement » un écart, c’est (en dehors des nombreuses remarques de mes professeurs qui m’ont déjà dis que j’étais en avance, même ici à l’EESI) que j’ai appris à lire seul avant d’entrer au CP (et mon frère aussi d’ailleurs) et que j’ai eu jusqu’au lycée de très bonne notes (18,5/20 de moyenne générale, ce qui d’ailleurs était frustrant parce que y’a un seuil où c’est difficile de s’améliorer).


Cela peut aussi expliquer mon refus actuel de connaître mes notes et mon rejet de la notation dans cette école, tu comprends que jusque là mes notes, toujours très haute (sauf en sport...), ont été comme en friction avec la discipline. Je perdais des points pas parce que j’avais pas compris la discipline, mais parce que la consigne n’est pas toujours très clair, parce que je faisais des fautes d’orthographe ou parce que j’oubliai une question (ou alors parce que je faisait des erreur bien sur, en particulier si la matière ne m’intéressait pas). Au delà d’un certain seuil, la note ne concerne plus qu’un aspect formel, un frein qui fais perdre du temps en surinvestissant le rituel du contrôle en défaveur du rapport véritable que je pouvais entretenir avec la discipline. La note, en s’alignant non pas sur l’investissement que je mettais dans un travail, mais en référant à ce qu’il fallait dire au moment du contrôle, perdais de sa valeur. La note qui représente le travail, n’est qu’une représentation, et si elle prends la place en s’imposant comme la seule médiation possible, elle empêche toute relation immédiate au savoir. Ca frôle l’absurde quand même les profs de collège font des cours où ils disent précisément ce qu’il faut apprendre pour le contrôle, dans ce genre de situation, si le contrôle prends la place du cours, si ce qui compte pour apprendre c’est la menace de la mauvaise note, comment croire en l’école, qui loin d’enseigner des matière, des manière de voir et de sentir le monde, ne fourni qu’un ensemble d’éléments qu’il faut apprendre par coeur pour le protocole abstrait du contrôle ? Et quand ce système, sous couvert d’égalité et de gage d’intelligence, est généralisé à tous le système scolaire à travers le baccalauréat ? En sachant que dans les lycées, les sujets du programme et le mode d’enseignement est plaqué (et vraiment plaqué) sur la forme même que propose la forme du baccalauréat ? Ce n’est plus le contrôle qui est juste là comme une sorte de vérification que tu a bien appris quelques chose, mais c’est lui qui devient la forme hégémonique autours duquel se base tout ton rapport à la discipline. Un rapport où ce qui compte n’est pas ce que tu fais ou ce que tu apprends, mais l’image que tu en fais apparaître, image qui doit être vu par le regard du maître d’école ou du protocole d’évaluation qui définit ce qui est juste ou pas. L’éducation nationale est basée sur ce rapport médié, construit sur la menace de l’exclusion scolaire et sociale : le contrôle. Voici le paradigme moderne sur lequel se base notre rapport au savoir, et face auquel l’EESI, malgré ses louables tentatives de s’inscrire dans la lignée des pédagogies nouvelles ou radicale, ne peut pas se désengager tant qu’il y aura ces ECTS, ces bilans, diplôme, contrôles et accords de Bologne, ou tant qu’elle n’aura pas trouvé un moyen de les désactiver. Et ce qui me rends assez triste c’est que cela veut dire que tant qu’il y aura ce contrôle, tant qu’il y aura cette menace, même si on en fait un déni en école d’art ce qui est presque pire (sous prétexte que les profs sont gentils, que on s’arrange après coup, que les profs voient quand il y a du travail, et puis que eux aussi ca les embêtes de noter mais bon faut le faire quand même donc c’est la vie, alors que ce que je critique ici n’as rien à voir avec des personnes qui sont de bonne volonté mais avec un statut et un protocole ; je met en cause le rôle du jury, et son envers que j'incarne, celui de candidat, le rituel de la notation, qui, le temps qu’il est jury et qu’il note, instaure une position de maître/esclave avec l’étudiant noté, une position de domination, c’est cela que je veux pointer. Là dedans le jury est tout autant coincé que l’étudiant-candidat, ils jouent chacun leur rôle, le problème n’est pas contre des personnes, ni même contre des statut, mais contre la relation qui construit ce mode de statut, contre la production de ce rapport de domination qui n’as rien à faire avec l’acte de pure création que j’espère présent en école d’art. La solution serait d’abolir la notation, de donner à tous le monde le diplôme, sans condition, sanctifiant ainsi 5 années de recherches quel qu’elles soient, plutôt que de d’être rivé sur la production visible et pour le coup aliéné au regard, sa partie spectaculaire s’il s’agit bien de cela). Je tente d’y voir un parallèle, à une échelle moindre mais tout de même, entre le rapport prolétaire/patron par exemple, qui est évidement construit culturellement, autours de la possession des moyen de production, parce que l’ouvrier est dépendant du salaire comme l’étudiant est dépendant de la note, et que c’est dans cette écart entre ce qui est produit et ce qui est payé, et entre ce qui est appris et ce qui est noté (valeur d'usage vs valeur d'échange), que se situe tout le gâchis qui résulte de cette menace. Cette menace est bien réelle (quoique maintenant je commence à comprendre comment jouer avec), la preuve en est puisqu’il y a des gens qui sont exclu tous les ans, puisque cela ne tient pas à la bonne volonté des professeurs mais à leur capacité effective (et en dernier lieu légale) de pouvoir le faire. Cette menace permanente influe sur ce qui va être montré, sur ce qui va être produit aussi, et est donc très différente d’une exposition. Le bilan (ou le diplôme), n’est pas une situation d’exposition où chacun montre ce qu’il a envie, ce qui lui tient sur le cœur. C’est (à moins que vraiment on s’en foute complètement du diplôme ou de devoir repasser l’année mais c’est là aussi où l’étudiant est aussi enchaîné que le jury) une épreuve de force, un moment où il faut plaire (ou disont convaincre, on ne peut peut pas décevoir), mais sans montrer qu’on veut plaire, d’où un certain paradoxe, une sorte de « soit radical ou tu redouble » (ce qui au passage est peut être un très bon moyen pour effectivement faire un travail radical, mais qui ne résout pas ce problème de pouvoir s’extraire de ce rapport de visibilité). C’est en tout cas comme ca que j’ai vu que certain (dont moi notamment) ressentais ce moment (peut être que c’est un peu différent sur Angoulême où il y a une atmosphère plus relax), car sinon comment expliquer le genre fréquente de remarque type « je voudrais bien sortir boire un coup mais il faut que je produise pour le bilan ». Non pas je préfère produire, non, il faut que je produise. Entre désirer produire et devoir produire, il y a un gouffre de désespoir que les quelques discours humanistes de ceux qui défendent l'acte de notation cachent avec peine.



Bon j’ai un peu dérivé, mais cette question du bilan et de manière générale de ce système scolaire (dont malgré tout ce qu’elle dit l’EESI fait partie) qui ne tient pas ses promesses, me tiennent finalement toujours à cœur. C’est dommage, j’avais cru enfin pouvoir faire confiance à une institution comme l’école d’art, je crois que je recherche malgré mes désillusions à pouvoir faire confiance à des institutions qui seraient capable de soutenir les émancipations que je recherche, à me dire qu’il existe des forme instituées d’État qui peuvent m’aider à m’épanouir. C’est passé pas loin pourtant, parce qu’en dehors de ce système de notation, l’école d’art aurait pu s’avérer être une hétérotopie des plus habitable, mais je me dis que ce qui la rend désirable actuellement tiens plus des personnes qui sont dedans et des situation conflictuelles qui m’ont permis de m’émanciper ; si je suis plus fort maintenant ce n’est pas grâce au système scolaire, c’est grâce à tous celles et ceux qui agissent en dehors et contre lui. J’ai ce que je voulais, une preuve (en tout cas sur un plan théorique) que l’institution, et derrière ca la république et tout ce qui est institué, est incapable actuellement d’accepter un total assimilationnisme, et c’est peut être mieux ainsi. Car c'est ca la question, comment mettre en place des institution qui construiraient de l'autonomie en dehors d'elles même ?En l'absence d'une proposition efficace j’ai encore une fois toutes les raisons de mon côté pour me protéger et le faire moi même, c'est à dire devenir anarchiste, où du moins en partie. Tant pis, c’est pas moi qui l’aurai cherché.



Bon je reviens sur Carlos Tinocco. Avec Sandrine Gianola et Phillippe Blasco, ils ont donc écrit un bouquin « les « surdoués » et les autres, penser l’écart », qui tente de partir de ce phénomène de la douance, tous en changeant de point de vue. Leur thèse, c’est que le fait qu’il y a des surdoué qui réfléchissent différemment de la norme n’est pas lié à une catégorisation psychologique ou médicale. Ceux qu’ils disent, c’est que eux même se revendiquant « surdoués », ils ne comprennent pas pourquoi les gens ne raisonnent pas comme eux. En utilisant la psychanalyse (mais pas freudienne, plutôt accès psychanalyse existencielle, qui est tout de même plus sympatoche), et surtout l’anthropologie, ils disent que notre monde moderne, tout comme les sociétés primitives, est bâtis sur des grand récit qui donne du sens à l’existence (la république, le football, le progrès, la famille, la réussite professionnelle), et que si l’on ne s’accroche pas à ces récit, alors on est face à un vide de sens de l’existence, une sorte de nihilisme fondamental, qui apporte alors une grande angoisse face à la mort. La conception anthropologique de l’intelligence qu’ils propose, c’est que on ne fait pas spécialement des raisonnements parce qu’on est plus intelligent, mais parce qu’on s’autorise ou pas à réfléchir, en fonction de son rôle dans la société. Nous ne sommes pas dans des société où l’on raisonne par soi même, mais dans une société où l’on fait semblant, où l’on joue un rôle, où l’on ne s’autorise à avoir des connaissances ou des remise en question que quand on y es autorisé. Tu l’as compris, ce qui est nommé "surdoué", ou plutôt « pensée surdouée » parce que c’est un processus, c’est en fait quand pour une raison ou une autre tu ne crois pas au récit collectif, ca ne fait pas sens pour toi, tu ressent une certaine étrangeté. Mais du coup, le surdoué n’est plus inhibé par le rôle qu’on lui demande, il sais que le rythme que tout le monde suit est factice, il sent que toutes ces inhibitions que tout le monde suit pour ne pas remettre en question le bien fondé de la signification des choses sont fausse. Face à ca, le surdoué, paniqué, est obligé de créer du sens, de construire par lui même un récit singulier, sa propre histoire, qui va pouvoir lui offrir une structure pour vivre une aventure de vie, mais comme cette structure est précaire elle est souvent remise en question, et on n’est jamais loin des surinvestissement libidinaux (obsession) ou de dépression (rien ne fait sens). La question que pose les auteur du bouquin, c’est « pourquoi considère t on que le fonctionnement typique (non-surdoué) est un fonctionnement sain ? ». En effet, à partir de ce paradigme, ils posent le mode de fonctionnement surdoué comme étant plus authentique, mais aussi plus souffrant et sidérant, car seul face à un monde dont tout le monde en nie l’absurdité originale.



La première partie du bouquin fait un petit résumé de la question du récit dans l’anthropologie, et sur la question du désir. Ils explique ainsi comment se forment des récits collectifs, autours d’une nation par exemple, mais ca peut aussi être autours d’un gang, autours d’une valeur (patriotisme), autours d’une communauté amoureuse. Cela créer du sens et permet de justifier le désir et aussi l’effort qu’on investi dans ce que l’on fait, quitte à mourir pour cela (dans le cas de mourir pour sa partie par exemple). La figure du shaman par exemple peut être vu comme celui qui, lorsqu’un récit s’effondre, peut en créer un autre, en invoquant les forces du réel qui échappe au récit, représenté par les esprits par exemple. Le shaman peut être vu comme une sorte de surdoué sous cette forme là, ou un fou, enfin tous ceux qui s’échappent du récit collectif (les shamans sont souvent choisis pour leur étrangeté au récit collectif par ailleurs). Dans cette situation là, qui agit comme une « communion extraordinaire » comme l’es notamment la transe (par opposition à la communion ordinaire du quotidien des rituels s’inscrivant dans le récit collectif), le shaman et le surdoué peuvent pendant un temps réécrire leur inscription dans le récit, ils deviennent auteurs avant de rejouer leur propres rôle. C’est en effet des figures qui semblent correspondre à ce que j’ai aperçu dans des bouquins sur le shamanisme, qui est aussi par ailleurs celui du bouffon ou du clown, qui singe le récit collectif pour en montrer toute la fiction. Le surdoué, contrairement aux typique, a la capacité de sortir du cadre, et donc de voir que ses actions sont conditionnés par ce même cadre, qui n’as rien de naturel.


La seconde partie tente de relier les questionnements et stratégie de défense face à l’impossibilité d’un sens transcendant aux traits cliniques utilisé pour décrire la douance. Ainsi le rapport au langage, au désir, à la cyclothymie (montagne russe émotionnelles), à la sidération, au transdisciplinaire, à la recherche de sens et de singularité, au rapport à l’autorité… et ca colle sacrément bien. En tout cas je ne peut qu’être surpris par la pertinence du propos. C'est une grille de lecture particulièrement riche pour moi, car cela permet de coller à un ensemble de ressenti, et même de thème dans mon travail, sans les relier à une sorte de construction clinique hors sol et essentialiste forcément génante, mais en les reliant à des questions très réelle et qui devient l'occasion d'une remise en cause épistémologique de la normalité. Cette volonté de sortir du cadre, cette sensation que l'on joue une pièce de théâtre, que l'on est dans un rôle qu'il est difficile de se détacher, ma volonté de sortir de ce cadre, de ce récit, tous ce truc du récit qui serait le récit moderne que je tente de formaliser et de m'extraire, c'est ce qui est décrit dans ce bouquin, quasiment preuve à l'appui. Je suis forcément assez enthousiaste.


Je suis même surpris que le livre n’ai pas été reçu aussi bien sur les quelques forums de « surdoué » où il est évoqué, sous prétexte que ce n’est pas très scientifique et que de la psychanalyse… ce qui tendrait justement à aller en faveur du bouquin, à savoir que il ne s’agit pas ici d’intelligence mais de s’autoriser à envisager des raisonnements en dehors d’à priori. J’ai trouvé aussi un post qui remet en cause la catégorie conceptuelle du surdoué. Comme tu vois cette question de la douance est complexe et soumise à polémique, elle n’est peut être qu’une illusion épistémologique, c’est d’ailleurs assez gênant quand ca frotte avec des questions d’égo pour savoir qui a le plus gros QI, voir quand ca mène à des complexe de supériorité, mais tout de même il a été montré qu’il y a une différence dans le traitement de l’information dans le cerveau d’un point de vue des neuroscience par exemple, ce qui ouvre quand même des questionnements (quitte à remettre en cause les implicites de la discipline). Ce qui me fascine là dedans, tu comprends, c’est que comme c’est un sujet un peu nouveau et soumis à controverse, et qu’il n’y a pas pour l’instant une théorie satisfaisante qui permettrait d’expliquer cette différence effective et ces traits en commun partagé par une certaine catégorie de la population, c’est peut être une brèche pour changer complètement de paradigme scientifique, comme le fait justement ce livre de Carlos Tinoco. Mais c’est peut être aussi une sorte de spéculation clinique, une construction de toute pièce d’un profil qui ne serait alors que le résultat d’une classification. C’est d’ailleurs tous le problème de ce terme, « surdoués », puisque sa description a tellement dérivée de son sens original qu’il y a ici tentative de mettre à jour un certain type de rapport à l’intelligence et à la sensibilité… sans qu’on ai trouvé de nom satisfaisant pour le nommer ou pour se mettre d’accord sur une base partagée (comme l’es par ailleurs la catégorie très controversée de bipolarité). Enfin ce qui me plaît beaucoup ici c’est qu’il y a un champ de recherche qui me semble très fécond, en plus d’être très ancré dans une réalité car c’est construit sur le ressenti personnel des auteur c’est pas juste de la pensée abstraite, et d’ailleurs cette proposition, à travers les langages de la psychanalyse et l’anthropologie, semble reprendre trait pour trait le modèle post-moderne sur les questions de l’antipsychatrie, de la déconstruction, d’une forme de nihilisme ontologique, de ce truc des méta récit, des normes partagé par Derrida, Guattari, Deleuze, Foucaults, Lyotard, alors même qu’il n’y font que très peu allusion (il apparaît une fois Foucault et une fois Lyotard, et encore c’est pour mettre à distance un certain post-modernisme qu’ils veulent critiquer alors que j’ai l’impression qu’ils ‘y inscrivent autrement).








Carlos Tinoco – vidéo à propos du livre

https://www.youtube.com/channel/UCTFSbMzp7yjguxH3eZU77CQ/videos

Pourquoi ce livre ?

https://www.youtube.com/watch?v=46nTxhi5b6M



Forum Adulte-surdoué – post sur la remise en cause du concept même de douance, ce qui fait débat

https://www.adulte-surdoue.fr/viewtopic.php?f=44&t=8649





Justement à propos de nommer… je reviens sur les black bloc. Il y a un article de Olivier Marboeuf sur la question. Il dit que le black bloc est similaire à une pratique de sorcellerie, et qu’il se situe dans l’innommable. Je ne vais pas refaire l’article, mais je joins aussi d’autres articles qui posent la question du black bloc et de l’émeute sous d’autres angles, notamment sensible et en dehors du langage (comme une sorte de monochromme de la politique, une pratique qui ne reverrait à rien d’autre qu’à elle même, qui serait alors dans une absence de représentation?) :







Olivier Marboeuf – L’émeutier et la sorcière

http://www.khiasma.net/magazine/lemeutier-et-la-sorciere/



Des black Bloc pas vraiment sans gêne – un ensemble de textes sur la question, avec des manifestes

https://infokiosques.net/article.php3?id_article=3



Brochure - Nous ne revendiquons rien – Johann Kaspar (dans une lignée « abolition » qui me plaît beaucoup, rien que la conclusion est très éclairante)

https://infokiosques.net/lire.php?id_article=791

« Une lutte sans revendications est une grève au niveau du langage. En refusant la forme convenue du cahier de doléances, le sens et la justification de l’action deviennent intrinsèques à sa présentation. »



Phénoménologie de la violence politique (tout frais de la semaine dernière, version Deleuze et Butler)

https://lundi.am/Phenomenologie-de-la-violence-politique-formes-sens-et-experiences-sensibles-de

« Imposer son rythme est le principal objectif des émeutiers. »

« Le geste est événement comme pur sens. Par exemple, la casse est un acte de silence qui dit l’être des choses : vitrines brisées, graphs et éclats de peinture sont autant de marques par lesquelles ce qui est dissimulé – la corruption, l’agression de la vie par l’économie, la dépossession – advient à la vie perceptive. »








Je t’avais parlé aussi du nom collectif Luther Blisset et du Manuel de communication Guerrilla



Manuel de communication-guerilla – Luther Blissett

http://www.editions-zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=145



Article sur Luther Blissett par… Luther Blissett apparemment

https://www.cairn.info/revue-multitudes-2006-2-page-175.htm







A propos de la destitution, du fait de non pas s’opposer à un pouvoir, mais de s’en extraire, de construire une force qui empêche la possibilité du pouvoir (et qui est à relier avec ces fameux Black Bloc). Cette question de la destitution me plaît beaucoup, je la trouve particulièrement puissante à investir.



Agamben – puissance destituante (c’est cette conférence qui m’a amené sur cette piste)

https://lundi.am/vers-une-theorie-de-la-puissance-destituante-Par-Giorgio-Agamben

« l’accomplissement de la loi est sa transgression »



John Holloway aussi théorise la "révolution" à partir de la destitution du pouvoir. Très inspiré des zapatiste et de son interprétation personnelle du capital (dans un livre il explique point par point la première phrase du capital, pour en décortiquer toute la portée), il a une vision très pluraliste de l'émancipation. POur lui, un père qui apprends à ses enfants à partager un gateau, ou un travailleur qui au lieu de travailler va lire un livre au soleil sont des partisans communistes qui s'ignorent, et dont les actions sont peut être plus efficaces que les militants autoproclamés.


John Holloway – Douze thèses sur l’anti-pouvoir

https://rebellyon.info/Douze-theses-sur-l-anti-pouvoir










Pour ce qui est de « sortir du cadre », puisque c’est en creux le sujet, je joint ici une ligne de trois vidéos que j’avais faite.




Le miroir

https://www.youtube.com/watch?v=EA6Zw8wLheg

Bon c’est pas ma préféré dans la technique ou le jeu c’est clair, mais y’a pas mal de thème et de forme « méta » qui sont en germe (c’est aussi pas mal d’impro, et fait avant l’eesi). Mine de rien je me rends compte que cette histoire du personnage qui ne veut pas qu’on le regarde, qui ne veut pas être représenté, c’est tout le propos que je développe après...




L’abyme

https://www.youtube.com/watch?v=5u8zWuIRMLE

La il s’agit d’un clip, et d’une mise en abyme, évidement. Je l’avais présenté au concours d’entrée de l’EESI. Le jury était un peu perplexe au début, mais quand j’ai dit que c’était l’histoire d’un personnage qui tentait de sortir du cadre même de son histoire (ici de son décors), pour atteindre un autre niveau de réel, et que je cherchais moi aussi à faire comme lui, c’est à dire à sortir du cadre du « flm de la vie » pour atteindre un état de réel, je crois que ca les avait convaincu. C’est en effet toujours en germe la question : comment sortir du « cadre » de notre existence, du récit, pour atteindre un décors un peu moins fictionné ?



SQUAT

https://www.youtube.com/watch?v=kfOn-IA3-K4

Je sais pas si je te l’avais déjà montré, mais voici le film le plus propre techniquement que j’ai jamais réalisé (wow). Je l’ai fait en DNA2, après avoir fait un stage sur un tournage que j’avais pas trop apprécié, pour me dire que j’étais capable de faire des courts métrages de qualité technique correcte avec peu de moyen et un peu d’écriture. La question du cadre se pose ici aussi, des contrats aussi, et de l’autorité, enfin tu me dira. C’est aussi un film fait avec mes potes, cela se ressent sûrement, pour cette question de filmer avec ses potes je comprends l’argument d’utiliser des professionnels, cependant par facilité et praticité j’aivais demandé à mes amis que je connais et pour qui j’avais écri ces rôles quelques jours avant le tournage (le film a été écrit et tourné en 1 semaine). Utiliser des acteurs professionnel serait à ce niveau là pour moi trop coûteux en terme émotionnel et logistique et m’enlèverai tout désir de mener le film à son terme. En fait même si le film serait certainement mieux, je trouve ca pour l’instant inimaginable pour moi de trouver et demander à des gens que je ne connais pas de jouer dans mes films, où alors il faudrait improviser, ou je sais pas, mais en fait il me semble que ca alourdirai tout le processus que j’ai déjà du mal à porter avec ce genre de tournage qui m’a épuisé (alors qu’il n’as duré qu’une journée…). Il y a aussi quelques chose entre la fiction et le documentaire, par exemple j’utilise leur vrai prénom dans le film, et il est dit que c’est un film de pote, enfin je ne l’ai pas encore vraiment pensé mais je crois qu’il y a une signification à creuser là dedans. Peut être que cette forme frictionné, trop propre, ne convient pas aussi pour ce que je veux faire.





Ces films s’ancre dans un mouvement, celui du « méta », consistant à nommer le cadre au sein du cadre, comme une sorte de mise en abyme, une autoréférentialité. J'imagine que c'est pas nouveaux en art, faudrait que je trouve un historique de ca, mais d'un point de vue "culturegeek" c'est assez apprecié, notamment Quentin Dupieux (alias Mr Oizo que j’avais déjà évoqué) est un spécialiste du genre, à travers le célèbre « Rubber », le dernier « réality », mais surtout avec son tout premier film, quasi art conceptuel, appellé « non-film » (qui est réellement un chef d’oeuvre). Il s’ancre aussi dans le cinéma de l’absurde version Ionesco, comme par hasard. Dans le mouvement méta, il y a aussi la « non-série » (en référence direct à Quentin Dupieux). Ils ont fait deux versions, la première, véritablement conceptuelle, est une sorte d’auto-making off documentaire, les premiers épisodes sont sacrements excitants, mais ca retombe assez vite dans de la private joke. La deuxième version est plus travaillée et fictionnée, mais se coupe de la radicalité documentaire en fonctionnant sur une préécriture. Ce qui est notable également c’est que c’est fait par un certain Arthur Laloux et ses potes, tout jeunes étudiants en cinéma.




Non-film – Quentin Dupieux

https://vimeo.com/32146368



Non-série « documentaire »– Arthur Laloux

https://www.youtube.com/watch?v=GGdbDyvIPWM&list=PL4suMtJC99poWji6tnfr8hstW0rRmLwe0


Non-série « fiction » - Artur Laloux

https://www.youtube.com/watch?v=-V18ylSFOU4&list=PL4suMtJC99po1wEbNRu9kWVGxqunBfdZM







Je m’arrète là, en fait j’avais écrit en plus une dizaine de page concernant le mémoire et le bilan qui me posent pas mal de questions soudainement. Mais puisque je ne veux pas trop tarder à t’envoyer ce mail qui est déjà bien long, que je ne me suis pas relu, parce que j’avance des thèses qui sont pas encore très claire, et que je viens d’avoir hier soir une superbe discussion avec l’artiste Pascal Lièvre au FRAC, qui m’a fait beaucoup avancer, je la met de côté. En gros je me rends compte que mon travail se situe au niveau du cadre (wow quelle surprise), et de la possibilité de garantir une marge, mais une marge qui ne serait pas dans le cadre, en gros une sorte de hors-cadre, du dehors. Du coup pour ce qui est du bilan ou du mémoire, mon travail ne se situe dans des formes à exposer, mais dans le fait de montrer ou modifier le cadre du bilan même, le rituel qui ne se questionne pas lui même. Il y a l’idée que le sujet construit l’objet, que le cadre construit la composition, et que s’il n’y a que des cadres, s’il n’y a que des compositions, alors il n’y a plus de réel (puisque le réel, c’est ce qu’on ne contrôle pas, c’est ce qui échappe à la composition, c’est le dehors du cadre). Donc, comment faire jouer l’épistémologie et l’ontologie ? comment créer du dehors ? Comment destituer la représentation ?



C’est en gros l’axe qui me permet de relier tout plein de chose


A mercredi 10h30